top of page

Un chapitre de mon second ouvrage


«L’après midi, il faut faire la sieste, ne serait-ce qu'une petite demie heure » ne cessait de répéter ma mère.

_ Une bonne sieste réparatrice qui vous fera grandir et calmera votre trop plein d’énergie. Vous devez respecter la quiétude des voisins qui se reposent à cette heure -ci. Devant notre résistance, parfois ma mère nous enfermait de force et gare à celui qui dérogeait à la règle. Le Martinet était bien accroché sur un coin du mur , dissuadant les plus téméraires d’entre nous.

C'est ainsi que le fameux Martinet fût un des meilleurs assistant de mes parents. Mais fort heureusement, en grandissant , la sieste fut vite remplacée par des moments de lectures studieuses, avec la découverte des livres illustrés qui nous faisaient voyager et nous évader avec les aventures rocambolesques de Zambla, Blek le Rock et Rouletabille...et plein d'autres

Tandis qu'à l'extérieur nous parvenaient les cris et les éclats de joie des enfants des nouveaux voisins, débarqués durant la nuit dans la discrétion la plus totale. Ils investiront la grande maison d'à côté avec tous ses meubles et commodités.

Le matin les enfants jouaient déjà tout exaltés et tout euphoriques face à leur nouvel environnement.

Ils jouaient pieds nus en culotte courtes , les joues pourpres et de la morve au nez.


Lorsque le clairon sonnait enfin vers 8 heures du soir, ils rentraient tous pour avaler en hâte de la galette chaude trempée dans des bols de soupes fumants.

Je fus souvent réveillée tôt le matin par les jacassement des poule en folie de la maison d'à côté.

Elles couraient dans tous les sens sous les hurlements et les cris de leurs poursuivants.

Après de longues minutes de course poursuite, la poule finissait toujours par se faire attraper et finir rôtie dans une marmite.

Des voisins certe bruyants mais si gentils. Ils avaient cette simplicité et cette modestie des gens de la campagne.

Même si leurs comportements nous paraissaient brutes et différents, ils avaient gardé en eux les vraies valeurs humaines, d’amitié et de solidarité.

Lorsque nous formions des petits groupes de jeux pour jouer à la marelle ou bien à colin Mayart, nos nouveaux voisins restaient en retrait sous le portique de leurs maisons, à nous dévisager sans oser se mêler à nos jeux de société. Pourtant nous n’étions que des enfants.

Ils avaient l'air effarouchés et intimidés, même si on les appelait pour se joindre à nous.

Les années de privations et de malheurs avaient marqué leur comportement en société. Les codes de la ville leur étaient étrangers et ils durent réapprendre à vivre comme ces petits citadins qui leur ressemblaient pourtant mais qui avaient l'air si différents et si bien habillés.

_ _Ne sois pas intimidée Fatma, viens te joindre à nous , tu verras on va jouer à plusieurs jeux très ludiques et amusants, c’est assez simple .

_On va d'abord jouer au passage du train et pour cela , on doit constituer deux haies en se tenant les mains de part et d'autre sous forme de haie.

Ensuite, tu apprendras avec nous les paroles en français....Il suffit juste de répéter avec nous Fatma, c'est très facile, on commence _Passez pon pon les carillons, les portes sont ouvertes, passez pon pon les carillons, les portes sont fermées à clé......le but était de retenir prisonnier un des enfants qui avait trop tardé sous la passerelle.

_Avec les autres filles, on aimait aussi former un rond en position accroupie puis on attendait qu'une fille prenne un mouchoir et commence à tourner autour de la ronde en chantant.

_J'emporte, j'emporte ma galette au four, j’emporte, j’emporte ma galette au four.

Mais au fil du temps le mot j'emporte est devenu jupons par déformation…et ça donnait _Jupon, jupon ma galette jupon !!

La fille criait à tue -tête, toute heureuse d’avoir été choisie, et tournait jusqu’à en perdre le souffle, puis laissait tomber discrètement son mouchoir derrière le dos d'une autre fille élue pour prendre la relève. Dans ces jeux, on sentait déjà du favoritisme et une innocence manipulée.

On se passait le mouchoir par degrés d’amitié ou de parenté.

Rien d’innocent dans ces jeux qui prenaient l'allure d’une arène dans laquelle étaient appliquée la loi du plus fort.

L'esprit de compétition prenait le dessus et on se livrait à de véritables guerres de clans…..insidieusement cachées dans des jeux soi disant ludiques.

Dans les jeux de billes , des combats acharnés sont livrés dans le seul but de gagner une partie, et s’accaparer toujours plus de billes que les autres. Des coudes à coudes serrés jusqu'aux coups de pieds, accompagnés de vociférations à faire éclater les tympans.

Combien de fois les faibles quittaient les rangs, en pleurs.

Le cœur gros , rempli d’amertume et de désespoir. Se sentir écarté d'un jeu était pour chaque enfant la pire des humiliations. Qui d’entre nous n'a pas vécu pareil offense !!

La hantise d'être écartée d'un groupe de jeu fut pour moi la première école de la vie. Comment m'affirmer et me surpasser parmi les autres et comment faire partie des leader de groupe ?

Que reste -il de ces moments de joie et d'innocence, de légèreté et d'insouciance ?

Tant que les souvenirs sont ancrés au plus profond de nous , les images ressurgiront aussi souvent que des flashs pour se rappeler à nous.


Posts similaires

Voir tout

2020

Livres Conseillés
Vidéos
bottom of page